Un jour Perrinet et Colin,
Deux enfants de même âge, entrés dans un jardin ,
S’égayaient à la promenade,
Et sous des marronniers faisaient mainte gambade :
Ils trouvèrent sur le gazon
Un fruit plein de piquants, fait comme un hérisson.
Colin le ramassa ; son petit camarade
Le crut un sot : —Tu tiens, dit-il, un mets
Des plus friands pour les baudets;
C’est un chardon, et ton gout est étrange.
Pour moi, je vois des pommes d’or;
Voilà mon fait, et la main me démange.
Perrinet à l’instant se saisit d’une orange,
Et croit posséder un trésor :
La couleur du métal que l’univers adore
Séduit jusqu’aux enfants. Celui-ci, bien joyeux,
Admire un si beau fruit, et s’imagine encore
Qu’il est d’un goût délicieux.
Il y fut attrapé, notre petit compère,
Car cette orange était amère.
Aussitôt qu’il en eut goûté,
Il la jeta bien loin. Colin, de son côté,
S’était piqué les doigts; mais sa persévérance,
Surmontant la difficulté,
Trouve un marron pour récompense.
Ce marron hérissé figure la science,
Qui sous des dehors épineux
Cache d’excellents fruits; tandis que l’ignorance
Sous une riante apparence
Produit des fruits amers et souvent dangereux.
“Les deux Enfants, fable Richer”