Édouard Parthon de Von
Poète, homme d’état et fabuliste XVIIIº – Les deux Papillons
Un papillon, avec l’aurore,
Au mois de mai, venait d’éclore.
Tout le ravit, l’enivre de bonheur!
Jusqu’au déclin du jour, au gré de son envie,
Sans s’arrêter, il court de fleur en fleur.
Un autre papillon, son aîné dans la vie,
Lui dit : < L’obscurité va promptement venir;
« Déjà le soleil baisse, et la nuit marche vite ;
« On ne doit pas donner tout son temps au plaisir;
« Avant le crépuscule il faut choisir un gite. »
« – Quoi ! dit le jeune fou, ce jour, rempli d’appas,
« En une obscurité profonde
« Se changerait ! Vous vous moquez du monde ;
« A votre nuit je ne crois pas.
» Après une heure encore, ainsi passée,
Elle arriva pourtant ; nuit humide, glacée,
Et dont il eut tant à souffrir,
Que le pauvret de froid pensa mourir.
C’est ainsi, mes amis, qu’on raisonne au jeune Age,
Et, plus tard,l’homme heureux n’est souvent pas plus sage:
Depuis seize heures le jour luit,
Donc il ne fera jamais nuit.
Édouard Parthon de Von