Maximilien Emmanuel-Charles de Malon
Un possesseur avoit, à sa Gentilhommière,
Substitué le plus beau des châteaux ;
Fait des cascades, des canaux,
En détournant une foible rivière ;
Formé des potagers, des terrasses, planté.
Son héritage étoit un domaine enchanté :
Nul autre lieu n’avoit droit de lui plaire…
Arrive un ordre de la cour,
Qui vous renferme dans sa terre,
Mais sans y limiter le temps de son séjour.
Il n’avoit point passé la premiere semaine,
Que son Parc, son chàteau, tout lui parut affreux.
Jugez s’il étoit malheureux,
Avant la fin de la quinzaine !
Tandis qu’il se lamentoit,
Famille, amis, chacun sollicitoit
Son voisin de chasser une antique Maîtresse,
Boiteuse, noire, louche, aigre, fausse, en un mot
De Lucifer le vrai ballot ;
Mais qu’il aimoit avec une extrême tendresse.
Sans fruit on lui peignoit ses défauts tous les jours.
Point de belle prison, point de laides amours.
“Les deux Voisins”