Fables de l’Académie des jeux floraux
Qui a concouru pour le Prix ; Par M. Edouard de Cazenove de Pradines.
Il y avait a Athènes une belle nommée
Théodote femme d’une humeur peu sévère..
Il faut lui faire visite, dit Socrate. Xénophon
Socrate, en méditant, pas à pas cheminait.
Tout vis-à-vis l’Amour venait,
El si vite il papillonnait,
Cet étourdi qui n’y voit goutte,
Qu’il vint cogner au front notre sage. Sans doute
Une tête moins forte eût pu se déranger ;
Mais l’Amour est si léger !
Le bon Socrate en rit, et l’arrête au passage :
« Ah! te voilà, dit-il; je prétends, à ton tour,
« Te corriger. » Quoi ! corriger l’Amour !
Il faut être fou…. comme un sage.
Tenant ainsi notre jeune indiscret,
Socrate prétend, tout-à-l’heure,
Le conduire dans sa demeure,
D’où jamais il ne sortirait
Que les yeux bien ouverts et les ailes rasées,
Choses, sans doute, fort aisées ;
Et, pressé qu’il était de commencer son cours,
Tout en marchant, lui débite un discours.
Il n’avait pas fini sa première partie.
Que notre enfant aussi bien que Platon
Parlait déjà philosophie :
Jugez ce qu’il devint à la péroraison !…
Seulement, on ne sait par quelle fantaisie,
Socrate acheva sa leçon
Dans la demeure d’Aspasie.
Je voudrais que tout précepteur
De ses enseignements lui-même fît usage :
Bien dire, est vertu de Rhéteur,
Bien faire, est le discours du Sage.
“Une Leçon de Socrate”
Recueil de l’Académie des jeux floraux – 1856