Villicus et Dominus
Vastantem segetes et pinguia culta ruentem
Liquerat abscisa rusticus aure suem,
Ut memor accepti referens monumenta doloris
Ulterius teneris parceret ille satis.
Rursus in excepti deprehensus crimine campi,
Perdidit indultae perfidus auris onus.
Nec mora, praedictae segeti caput intulit horrens,
Poena sed indignum quod geminata facit.
Tunc domini captum mensis dedit ille superbis,
In varias epulas plurima frusta secans.
Sed cum consumpti dominus cor quaereret apri,
Impatiens fertur quod rapuisse cocus,
Rusticus hoc iustam verbo compescuit iram,
Affirmans stultum non habuisse suem.
Nam cur membrorum demens in damna redisset,
Atque uno totiens posset ab hoste capi?
Haec illos descripta monent, qui saepius ausi
Numquam a peccatis abstinuere manus.
Le fermier et le Maître
Comme un sanglier dévastait les moissons et les riches cultures d’un domaine, le fermier ne l’avait laissé aller qu’après lui avoir coupé une oreille, dans la pensée que la bête garderait le souvenir, ainsi que la marque, du châtiment subi et que désormais elle épargnerait ses terres couvertes de jeunes pousses. Une seconde fois, tandis qu’il faisait encore des dégâts dans le champ, pris sur le fait, il perdit pour sa perfidie l’oreille à laquelle on avait fait grâce. Sans tarder, le brigand revint montrer sa tête hirsute dans les champs ensemencés. Mais les deux châtiments déjà infligés font paraître ce méfait d’autant plus grave. Le fermier le prit et le donna pour la table somptueuse du maître, après l’avoir coupé en morceaux pour le servir de diverses manières. Mais, quand l’animal eut été mangé, le maître en réclama le coeur et s’irrita de ce que le cuisinier, d’après ce qu’on lui rapporta, l’avait dérobé. Alors le fermier calma sa juste colère par cc propos : « Ce sanglier insensé, assura-t-il, n’avait point de coeur : pourquoi en effet serait-il follement venu risquer ses membres et par le même ennemi se faire prendre tant de fois?
Ce récit s’adresse à ceux qui, plusieurs fois coupables, ne peuvent s’empêcher de retomber dans leur faute.