Jadis il fut un loup qui, dans un moment de ferveur, voua de faire un carême de quarante jours, et de s’abstenir scrupuleusement de chair pendant tout ce temps. A peine il avoit prononcé son serment qu’il rencontra un mouton gras et dodu. « Ah! quelle occasion, s’écria-t-il, « si je n’avois pas fait un vœu! Mais cependant, si je ne mange point ce benêt, viendra un autre qui le mangera et qui se moquera de moi. « D’un autre côté, après tout, il faut bien dîner. Acheter un saumon ou un brochet, il m’en coûtera deux fois davantage. Eh bien! appelons cet animal saumon, et mangeons-le comme tel. »
Je veux vous apprendre par là que rarement un homme vicieux se corrige de ses mauvaises inclinations : une occasion de rechute s’offre-t-elle à lui, adieu les belles résolutions, il y succombera.
“Du Loup qui avait fait un voeu”