Jean Vauquelin de la Frenaye
Poète, avocat et fabuliste XVIº – Épigrammes
ÉPIGRAMMES : DE LA VARIÉTÉ DE FORTUNE.
Celui qui pauvre s’alloit pendre,
Trouve un trésor dans un poteau:
Pour le trésor qu’il alla prendre,
Il laissa là son vil cordeau.
Mais celui qui riche avoit mise
Sa pécune au poteau fendu,
A du pauvre la corde prise,
Et, misérable, s’est pendu.
EPITAPHE SUR UN CAS PITOYABLE.
Passant, de ce tombeau la pitié considère:
Par mégarde la sœur tua son petit frère :
La mère occit sa fille, et le mari la mère;
Et la justice fit décapiter le père.
ÉPIGRAMME SUR UN BUVEUR.
On dit à Jean que par trop boire
Il perdrait à la fin les yeux:
Buvant, dit-il, j’aurai mémoire
D’avoir vu la beauté des cieux :
Adieu, mes yeux ! assez j’ai vu ;
Mais encore assez je n’ai bu.
ÉPITAPHE DE P. DE RONSARD.
Ronsard, Tours te bâtit fidelle
Un tombeau : sais-tu bien pourquoi ?
Afin que tu vives par elle,
Et qu’elle vive aussi par toi.
ÉPITAPHE.
L’Aretin repose en ce lieu,
Qui de tout médit, fors de Dieu :
Car l’Are tin ne médisoit
Que de cela qu’il connoissoit :
Dieu ne connoissant en nul point,
L’Aretin n’en médisoit point.
ÉPITAPHE DE JAC. TAHUREAU.
Ecuyer, sieur de la Chevalerie
Mon Tahureau mignardelet,
La Parque, fatale déesse,
Rompit de tes ans le filet
Au bel été de ta jeunesse,
Sachant que toujours tu vivrois,
Et que jamais tu ne mourrois,
Si tu parvenois en vieillesse.
Les Poètes Francois, Depuis Le XII. Siècle Jusqu’à Malherbe, V.5 , 1824
Jean Vauquelin de la Fresnay 1536 – 1607
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