Hercule avait chassé sur le mont Pélion.
Percés de traits inévitables,
Frappés de coups épouvantables,
Que de monstres défaits ! Un énorme lion
A l’œil étincelant, à la voix menaçante,
À la faim toujours renaissante,
Depuis dix ans la crainte et l’horreur de ces lieux,
Ou le roi, si vous l’aimez mieux,
Malgré sa griffe aigüe et sa dent meurtrière,
Vaincu lui-même enfin gisait sur la poussière.
Du lion Néméen c’était l’affreux pendant.
Expirant comme lui sur une roche aride,
Il menaçait encor son vainqueur intrépide
Dont la suite de loin tremble en le regardant.
Quelques vermisseaux cependant,
Qui, vils rebuts de la nature,
Sur quiconque a vécu s’arrogeant certains droits,
Des Ânes, des lions, des goujats et des rois
Et des dieux mêmes, que je crois,
Font également leur pâture,
Quelques vermisseaux prétendaient
Qu’à tort on avait fait le défunt si terrible ;
À leur gré, rien de plus risible
Que les bruits qui s’en répandaient.
« Trois coups ont suffi pour l’abattre.
Il serait dès long-temps ce qu’il est aujourd’hui
Si loin de trembler devant lui
Tel qu’il a digéré, l’avait osé combattre.
S’il a vaincu, s’il a régné,
Sa force était dans leur faiblesse. »
Cessez, dit Hercule indigné,
Cessez un discours qui me blesse ;
Pareils à maint historien
Qui dans sa nullité dissèque aussi la gloire,
Vous réduisez l’obstacle à rien
Pour réduire à rien la victoire.
Quoique vous en disiez, le roi de ces forêts
N’était ni faible ni timide.
Songez que pour le vaincre il a fallu les traits,
La massue et le bras d’Alcide.
“Hercule, le Lion et les Vermisseaux”