Avez-vous, quelquefois, quand bien bas tout sommeille,
Quand le matin si doux lentement se réveille,
Avez-vous, chers enfants, écouté des oiseaux
Les bonjours radieux, les chants toujours nouveaux?
Avez-vous entendu souvent leur voix légère
Adresser au bon Dieu leur touchante prière?
Puis caresser les fleurs, sauter sur les gazons,
Et répéter gaîment leurs gentilles chansons?
Sans doute, direz-vous; je vois leur troupe heureuse
S’élancer dans les airs, étourdie et joyeuse ;
Je l’entends se parler et chanter tour à tour,
Tandis que, moi, je reste assis pendant le jour
Devant la table noire où, triste, je griffonne
D’un long verbe ennuyeux le mode et la personne ;
Ou, sur un grand tableau, la baguette à la main,
Des temps bien loin de nous je reprends le chemin.
Des peuples qui sont morts me rappelant l’histoire,
Il me faut de cent noms torturer ma mémoire,
Dire et redire encor les anciens, les nouveaux :
Oh ! que bien plus heureux sont les petits oiseaux !
Pourquoi donc n’ai-je pas les ailes si légères
Des beaux papillons bleus courant sur les bruyères?
Les vents me seraient doux, l’air toujours spacieux ;
Je m’en irais bien loin voyager dans les cieux !
Pourquoi ne suis-je pas la petite hirondelle?
Je volerais aussi, m’enfuyant avec elle.
Partir!… Oh! non, jamais! Comment quitter ainsi
Sa mère, ses parents, tous ceux qu’on aime ici ;
Le maître sérieux, les compagnons faciles….
Voila nos bons amis, a nous, enfants dociles !
En pourrions-nous encor désirer de nouveaux?
Oh ! bien plus malheureux sont les petits oiseaux !
Enfant, vous l’avez dit, triste est souvent la cage;
Mais elle est douce aussi, quand on est bon et sage,
Ici-bas tout s’occupe, et chacun comme vous:
L’oiseau, pour ses petits, bâtit un nid bien doux,
Il vole au fond des bois chercher leur nourriture,
Puis il revient chanter le Dieu de la nature !
Ses chants sont sa prière ; imitons-le toujours :
Qui travaille et qui prie est béni tous les jours.
“La Cage et les Oiseaux” Mlle. Isabelle Rodier.