Timoléon Jaubert
Poète, magistrat et fabuliste XIXº – La critique
Voulez-vous un critique ardent, impitoyable ,
Trouvant le bon mauvais, le mauvais détestable,
Se disant du bon goût le fidèle gardien ?
C’est le sot qui ne produit rien.
Sur un tas de feuilles couchée,
Près de la ferme, dans un bois,
Mère pour la première fois,
Reposait Aramis, la nouvelle accouchée.
Aramis, aux crins d’or, n’était qu’une jument,
Un âne, le premier, risqua son compliment :
Un pourceau s’inclina, c’est se conduire en sage.
Une brebis du voisinage,
De la maternité sentant le doux frisson,
Sous sa laine abrita le jeune nourrisson.
Un mouton lui prédit un heureux caractère ;
La chèvre lui donna son lait ;
Disant que le petit ressemblait à son père,
Un dindon le trouva parfait !
Chacun fut bienveillant, la mère était heureuse.
Survint une autre visiteuse :
« Vous en si bel état !… dit-elle, vous, ma sœur ?
« Voyons ce cher trésor ; juste ciel! quelle horreur !.
« En moi, belle Aramis,vous n’aurez point d’émule,
« Fallait-il mettre au monde un pareil avorton ?.»
Pourrait-on bien savoir qui parla sur ce ton ?
………………
– Mes amis, c’était une mule.
Timoléon Jaubert