Aux branches d’un tilleul une jeune fauvette
Avait de ses petits suspendu le berceau.
D’écoliers turbulents une troupe inquiète,
Cherchant quelque plaisir nouveau,
Aperçut en passant, le nid de la pauvrette.
Le voir, être tentés, l’assaillir à l’instant,
Chez ce peuple enclin à mal faire,
Ce fut l’ouvrage d’un moment.
Tous sans pitié lui déclarent la guerre.
Le pauvre nid vingt fois pensa faire le saut.
Il n’était si petit marmot
Qui ne fit de son mieux pour y lancer sa pierre.
L’alarme cependant était grande au logis.
La fauvette voyait l’instant où ses petits
Allaient périr ou subir l’esclavage ;
Un esclavage, hélas ! pire que le trépas !
Les gens qu’elle voyait là-bas
Etaient assurément quelque peuple sauvage
Qui ne les épargnerait pas.
Que faire en ce péril extrême !
Mais que ne fait-on pas pour sauver ce qu’on aime !
Elle vole au-devant des coups ;
Pour sa famille elle se sacrifie,
Espérant que ces gens, dans leur affreux courroux,
Se contenteront de sa vie.
Aux yeux du peuple scélérat
Elle va, vient, vole et revole,
S’élève tout à coup, et tout à coup s’abat,
Fait tant qu’enfin cette race frivole
Court après elle et laisse là le nid.
Elle amusa longtemps cette maudite engeance,
Les mena loin , fatigua leur constance ;
Et pas un d’eux ne l’atteignit.
L’amour sauva le nid, le ciel sauva la mère.
A ses petits elle en devint plus chère.
Dieu sait le joie et tout ce qu’on lui dit
A son retour de touchant et de tendre !
Comme ils avaient passé tout ce temps sans rien prendre,
Elle apaisa leur faim ; puis chacun s’endormit.
“La Fauvette”