Certaine femme et coquette et jolie,
Au physique, du moins, créature accomplie,
Ne se couchait jamais le soir
Sans que son fidèle miroir
L’eût assurée encor qu’elle était la plus belle.
« Tu ne me trompes pas, ami, lui disait-elle ;
Aussi, j’ai confiance en toi,
Bien plus qu’en parole de roi.
De l’encens des flatteurs aisément on s’enivre,
Près de la vérité, seulement, je veux vivre,
Et c’est la vérité qu’en toi je viens chercher. »
Hélas, cette beauté dont elle était si fière,
Un mal affreux, bientôt, la lui vint arracher.
Ce n’était plus la belle de naguère ;
Ses attraits étaient remontés
Aux mains du Créateur qui les avait prêtés.
Au miroir, en tremblant, elle rendit visite.
Celui-ci franchement lui montre sa laideur,
La pauvrette le brise et s’enfuit au plus vite
En s’écriant : « Tu mens, misérable imposteur ! »
La vérité nous plaît lorsqu’elle nous profite ;
Dans le cas contraire on l’évite.
“La Femme et son Miroir”