Une femme, à Paris, avait en son ménage
Je ne sais pas comment, pour tout bien, tout potage,
Dit-on, un phénomène, un fait surnaturel,
Un précieux trésor, vraiment providentiel.
Cette femme attirait chez elle grande foule
Pour observer les œufs, d’une étonnante poule
Qui, presque tous les jours, on me l’a dit souvent,
Après son déjeuner pondait un œuf d’argent.
Eh bien ! apprenez donc que cette sotte femme,
Mue, hélas! par l’appât d’un gros gain qui l’enflamme,
Qui devait avant peu procurer beaucoup d’or,
N’étant pas satisfaite en demandait encor,
Tandis que bien des gens, avec pareille aubaine,
Mèneraient douce vie, heureux comme une reine ;
Cette femme s’est dit, enfin, pourquoi pas deux ?
Décidément, par jour, je désire deux œufs.
A cette poule il faut, j’en ferais la gageure,
Augmenter, octroyer plus forte nourriture ;
Sur ce, donne à sa poule une ample portion,
Telle, qu’elle en creva d’une indigestion.
Il faut se contenter de ce que l’on possède,
A notre ambition c’est l’unique remède ;
Bien souvent, en voulant augmenter quelques gains,
Ce que nous possédons nous échappe des mains.
“La Femme et la Poule”