Un miroir de métal qu’on nomme Réverbère
D’une Lampe allumée au loin jetait les feux,
Et, dans l’accès d’un délire orgueilleux,
Se croyait seul l’auteur de toute la lumière.
» Pauvre Lampe , dit-il, sans moi que serais-tu ?
» Tu ne serais, la chose est trop visible,
» Qu’un lumignon imperceptible !
» De m’éclairer moi-même aurais-tu la vertu ?
» Ma Foi, c’est fort douteux, je pense ;
» Tandis qu’au loin moi je dispense,
» Sur les murs et sur les passans
» Les feux les plus éblouissans. »
Qui sait jusqu’où le Réverbère
Aurait poussé les sots propos ?
Lorsque, s’éteignant à propos,
La Lampe dans la nuit plonge le téméraire
Qui fut bien forcé de se taire.
Ainsi, non loin de nous, on vit tel favori,
Tout bouffi, d’un orgueil dont tout le monde a ri,
Se croire seul l’appui sur qui l’état repose ;
Mais, un beau jour, le souverain
Daigna lui retirer son oreille et sa main :
Que devint-il ? Rien, ou fort peu de chose.
“La Lampe et le Réverbère”