Venez ici, Minet, il faut que je vous gronde;
Avancez près de moi.
On dit que sans pitié vous griffez tout le monde;
C’est très joli, ma foi !
D’où venez-vous encor avec cet air sauvage
Et ce poil hérissé?
Avez-vous de souris fait un nouveau carnage?
Arrivez-vous blessé?
Ou bien, sur mes cahiers répandant l’écritoire,
Auriez-vous en courant
Tracé, dans ses détours, une rivière noire
Sur mon beau papier blanc?
Voyons, répondez-moi, je suis douce personne, !
Dites-moi vos méfaits.
Je ne gronderai pas, Minet, je vous pardonne
Ces terribles forfaits.
Eh quoi t pas un regard, pas même une caresse f
Vous êtes un sournois :
Moi qui vantais partout vos tours de gentillesse.
Votre joli minois.
Que vois-je près de vous rouler dans la poussière?
Ciel ! mon oiseau chéri !
Quoi! vous avez tué, d’une dent meurtrière,
Mon charmant Favori ?
Celui qui m’égayait de son gentil ramage,
Dont vous étiez jaloux,
A péri tristement enlevé de sa cage !
Ah! c’en est fait de vous !
Allez, ce trait cruel vous ravit ma tendresse!
Je voulais pardonner;
Mais mon cœur, attristé de votre humeur traîtresse,
Dit qu’il faut condamner.
Fuyez, fuyez bien loin, redoutez ma présence,
Je ne veux plus vous voir,
Et de ne plus jamais juger sur l’apparence
Je me fais un devoir. »
“La petite fille et son chat”, Isabelle Rodier.