Simon-Pierre Mérard de Saint-Just
1769.
Avec un âne un chameau voyageoit ;
L’ennui, pour sûr, en tiers, s’étoit mis du voyage.
Au milieu de leur route un fleuve traversoit :
Le chameau, tout d’abord , en tente le passage ,
Et tôt après crie à son compagnon :
Ami, le gué me semble sûr et bon ;
L’eau ne m’arrive pas à la hauteur du ventre.
L’âne répond, je n’ose m’y fier ;
Car ce fleuve , où tu veux que j’entre,
Me couvriroit, moi, tout entier.
Sachons nous-mêmes nous connoitre ;
Et que chacun n’imagine pas être
De savoir, de vertus un composé parfait :
Trop de risques l’on court, lorsque l’on veut paroître
Plus grand qu’on ne l’est en effet.
“L’Âne et le Chameau”