Certain berger, ladre et colère,
Exigeant tout, ne donnant rien,
Était sans cesse en guerre
Avec son pauvre chien.
Le bon diable eut beau faire,
Veiller jour et nuit au troupeau,
Écarter les loups de la plaine,
Parcourir cent fois le coteau,
Il fut toujours mal payé de sa peine.
Quoique plus maigre chaque jour,
Pour son maître il eut même amour,
Et, patient, essuya maint orage.
Mais il demande enfin qu’on augmente son gage,
Et le berger, plein de courroux,
Surpris d’un tel langage,
Va le rompre de coups.
Le chien, las, dégoûté, contre son habitude
Perd contenance, et porte ailleurs ses pas,
Disant : « On sert mal ceux qui ne nous aiment pas. »
Le berger, furieux, crie à l’ingratitude.
C’est là l’usage des ingrats !
“Le Berger et son Chien”