Eh quoi ! c’est toi, mon vieux compère !
Dit le renard au bouc. Tu t’es donc retiré
Du mauvais pas ou tu t’étais fourré
Étourdiment : je revenais de faire
Au ciel mon ardente prière
Pour ton salut ; je me vois exaucé !
De compagnie allons encor. — Vil hypocrite !
Lui dit le bouc, ne vas-tu pas,
Me voyant tiré d’embarras,
T’en attribuer le mérite ?
Par la barbe de mon menton
Qu’insolemment tu m’alléguais naguère,
Je n’irai pas encore, à la légère,
M’associer à toi pour compagnon.
Car entre nous, voilà la différence,
Du puits Guillot lui-même m’a tiré ;
Quand un méchant pareil à toi, je pense,
Y serait bien pourri toute l’éternité.
Or, dans ce puits j’ai vu la vérité
Que d’un méchant il faut fuir l’alliance.
Et là-dessus chacun tire de son côté.
Adieu, dit le renard, vieux sot, vieil encorné.
“Le Bouc et le Renard”