Le chat tenant un coq et voulant le manger,
Mais le manger avec justice,
Comme le punissant ou d’un crime ou d’un vice,
Que l’intérêt public l’obligeait de venger.
Malheureux, lui dit-il, lorsque l’homme sommeille,
Au point du jour, tranquillement,
Pourquoi, dans ce même moment,
Faut-il que ton chant le réveille;’
Si j’ose, dit le coq, ainsi le réveiller
Par lé bruit que fait mon ramage,
C’est que je l’avertis d’aller a son ouvrage.
Fort bien, reprit le chat, mais quand sur ton pallier
Tu prends pour femme et ta sœur et ta fille,
Ta mère même , et que dans ta famille ,
Sans cesse tu commets mille incestes affreux ,
Comment appelles-tu ce commerce honteux ?
Je ne le fais , lui dit la pauvre volatile,
Qu’afin de lui donner un plus grand nombre d’œufs.
Tu sais fort bien, dit le chat, te défendre ,
Ou ne peut pas mieux raisonner ;
Mais las que je suis de l’entendre ,
Je n’ai pas résolu de ne point déjeuner.
Quand le cœur une fois se résout à mal faire ,
Rien ne saurait plus l’en distraire.
“Le Chat et le Coq”