Paul Vallin
Poète, romancier et fabuliste contemporain – Le choix d’un destin !
Je vous livre l’aventure, taillée à ma mesure,
du choix que nous avons parfois à opérer :
Droite, Gauche ou Milieu, la voie est hasardeuse …
Au matin d’un printemps invitant à s’ébattre,
un Agneau déluré s’éloigna de sa mère
pour s’en aller brouter à l’orée d’une forêt
où l’herbe paraissait plus tendre, moins piétinée.
Soudain un Loup surgit de la lisière toute proche,
ouvrant une large gueule en exhibant ses dents,
bavant en savourant d’avance son festin.
Face à cet appétit férocement affiché,
l’Agneau sent son instinct de survie décuplé
et, d’un bond, il s’enfuit, se réfugiant, haletant,
dans une chapelle jouxtant l’herbage de la prairie
où il se barricade au nom du Droit d’asile.
Le Loup, sans se presser, a suivi ce gigot
qu’il compte déguster à l’heure de son dîner.
Il s’installe sur le seuil du saint lieu monastique
pour attendre que l’Agneau achève ses prières
et veuille bien ressortir pour servir le repas.
Mais au bout d’un moment, la faim le tenaillant,
il invite l’innocent à venir le rejoindre
hors des murs du refuge afin de profiter
du soleil printanier et de l’herbe du pré.
Ce Loup croyait au ciel et même aux Écritures :
– Malheureux ! clama-t-il, n’as-tu pas lu la Bible ?
Ignores-tu que les Prêtres immolent sur leur autel
les bêtes de ton espèce qu’ils offrent en sacrifice
pour se faire pardonner leurs fautes et leurs péchés ?
Veux-tu servir d’offrande à leur dieu sanguinaire ?
– Je n’ai pas cette crainte, car il n’y a personne
dans cet enclos de pierres dont la porte est fermée.
– Mais quand le Prêtre viendra avec son grand couteau,
t’allongeant sur l’autel, il te tranchera la gorge
en marmonnant formule pour te faire croire en Dieu.
Sors de là au plus vite pour éviter ce sort !
– Peu me chaut ton invite ! lui rétorqua l’Agneau.
Je ne saurais trouver meilleur d’être égorgé
par vulgaire carnassier plutôt qu’être sacrifié
sur l’autel d’un curé implorant son pardon.
Pour moi, comme pour les miens, c’est du pareil au même,
au moins, dans la chapelle, j’ai le temps de prier
pour implorer du ciel de changer mon destin.
– Oh ! ami d’appétence, tu me fais grande peine,
dit vivement le Loup en quittant prestement
le seuil de la chapelle talonné par les chiens
du berger recherchant son agneau égaré.
Il est des agneaux comme des humains piégés,
ne sachant plus quel saint ils pourraient évoquer
pour tracer l’avenir de leur pauvre destinée.
En ces temps chaotiques, aucun choix n’est plaisant ;
Il faut pourtant opter hors des murs du moment !
Paul Vallin