Pour gouverner les animaux
Avec plus d’ordre et de méthode,
Le roi lion veut rédiger un code.
On a vu Frédéric, Pierre et d’autres héros
Mettre cet usage à la mode.
Diversité de lois est souvent incommode;
Qui règne aime à pouvoir s’expliquer en deux mois.
Cependant il fallait en un corps de doctrine
Rassembler les matériaux.
Dès lors, notre prince imagine
D’avoir autour de lui des conseillers d’Etat,
Qui prendra-t-il? De l’ours on fait état,
Mais il est brusque en son langage.
Maître bœuf est trop lent; trop prompt est le cheval;
Bertrand n’a pas Je maintien assez sage;
On trouve l’écureuil trop chétif personnage;
L’âne est un bien sot animal;
L’éléphant est disert, c’est seulement dommage
Que par trop de science il blesse et décourage;
Le léopard se montre impérieux;
Messire loup parait trop odieux;
Le chevreuil est doux mais timide,
Le tigre beaucoup trop perfide,
Et le bélier trop généreux.
Du renard même on craignit la finesse;
Bref, au rebut fut mise chaque espèce :
Le monarque était ombrageux;
Il crut devoir, dans sa sagesse,
N’admettre que des chiens couchants.
Parmi nous, bien des rois ne sont pas moins prudents.
“Le Conseil d’Etat du lion”
- Goswin Joseph Augustin, baron de Stassart, 1780 – 1854