Dans un bocage aimé des dieux
Que parfument toujours et le lis et la rose,
Et qu’une eau fraîche et pure incessamment arrose,
Philomèle essayait ses chants mélodieux :
Ces chants avaient déjà charmé le voisinage
Et les habitans du bocage
Applaudissaient à qui mieux mieux.
Un seul serpent, caché sous une roche aride,
Gonflé de haine autant que de venin,
A juré le trépas de ce chantre divin :
De meurtre et de vengeance avide,
Il médite en secret un barbare dessein.
Un jour que Philomèle, en chantant sous l’ombrage,
Avait ravi les champs et le hameau,
Et de l’affreux reptile envenimé la rage,
Elle se reposait en paix sur son rameau :
Le serpent qui la guette au même instant s’avance
Sur Philomèle avec fureur s’élance,
L’enlace de ses plis, et, soudain, dans son flanc
Lançant son dard fatal, s’abreuve de son sang.
Philomèle n’est plus : c’en est fait, le bocage
Ne retentira plus de son tendre ramage :
Tout s’attendrit sur son malheureux sort,
Et du vallon les nymphes éplorées,
A la douleur livrées,
Pleurent amèrement sa mort.
“Le Deuil du Bocage”