C’est une vérité cent fois dite et redite,
Mais qu’on ne saurait trop dire encor de nos jours,
Qu’en ce monde on n’a pas toujours
Ce qu’on mérite.
J’avais porté mes pas vers le palais des rois ;
Un soldat en gardait l’entrée.
Son front chauve et sa joue autrefois déchirée
Attestaient de lointains exploits.
Sur ses traits obscurcis d’une noble poussière,
On lisait que sa vie entière
Pour son pays ne fut qu’un long combat ;
Et pourtant, à sa boutonnière
Mon œil cherchait en vain la croix chère au soldat.
Pensif, je m’arrêtais ; quand soudain à ma vue
S’offrit un jeune fat au maintien orgueilleux :
L’étoile de l’honneur, à son sein suspendue.
Des rayons du soleil réfléchissait les feux.
Le soldat l’aperçut et lui porta les armes ;
Mais au bruit du mousquet se joignit un soupir,
Et mes yeux dans les siens virent briller deux larmes
Qu’il s’efforçait de retenir.
« Le Factionnaire »