Dans la Grèce, dit-on , jadis, un jeune Sage,
D’un Fleuve en observant le cours,
Lui tint à peu-près ce discours :
« Fleuve, apprends-moi qui te donne en partage
« Ce cours majestueux qui captive les sens ;
» D’où te viennent ces flots sans cesse renaissans ?
» De quelle main as-tu reçu l’urne féconde
» D’où jaillissent tes dons divers
» Qui vont porter dans l’univers
» Les richesses dont il abonde ?
» Dans le lointain, vois-tu le mont Athos ?
» Répond le Fleuve ; là, se forment tous mes flots ;
» C’est au sommet de la montagne
» Que je reçois du Ciel le trésor de ces eaux,
« D’où découlent dans la campagne,
» Et la fertilité qui partout m’accompagne,
» Et mes bienfaits toujours nouveaux.
» Veux-tu de ton esprit agrandir le domaine ?
» Ajouta-t-il, imite-moi :
» Jusques aux cieux, dans l’ardeur qui t’entraîne,
« Par la pensée élève-toi :
» Et bientôt des hauteurs de la voûte éthérée,
» Ton esprit, s’élançant au terrestre séjour,
» Y répandra l’éclat de la flamme sacrée,
» Par qui, de la terre enivrée
» Tu sauras obtenir le respect et l’amour. »
A cette voix par les Dieux inspirée,
Le jeune homme long-temps se recueillit, dit-on.
Ce jeune Sage était Platon.
“Le Fleuve et le Sage”