Un jour de février, froid , mais pur et serein ,
Errant dans la campagne un brillant citadin
Fut tout à coup saisi par un accès de goutte.
Le bonheur veut que sur sa route
Notre pauvre éclopé rencontre un échalas :
Il le prend et s’en sert pour assurer ses pas.
Grâces à ce secours, lentement il se traîne.
Enfin chez lui revenu hors d’haleine,
Il s’assied , et bientôt dans son riche salon
Honteux de voir cet ignoble bâton,
II se hâte, pour s’en défaire,
De le jeter au feu. — « Quoi! d’un pareil salaire
Payer un tel bienfait! » — «C’est fort mal, j’en convien ;
Mais, dans ce monde ingrat, on est compté pour rien
Dès que l’on n’est plus nécessaire. »
“Le Goutteux et l’Echalas”
- Théodore Lorin, 18.. – 18..