Daniel Allemand
Fabuliste contemporain – Édito – Le langage des fables
Daniel Allemand, né à Grenoble, études à Champollion, licencié d’Histoire et Géographie, j’ai exercé de multiples activités, de l’éducation nationale au monde des assurances puis de la finance, en m’impliquant aussi dans la vie publique de ma commune. Depuis les années 2000 je me consacre à l’écriture (romans et poésie) et au dessin (encres de chine et aquarelles)… la suite sur le blog…
Le langage des fables.
Le monde étant complexe, l’enfant qui vient de naître méconnait tout de l’univers qui l’entoure ; telle est sa destinée, passer des portes avec une part de connaissance collective, pour cheminer et appréhender le monde à découvrir. Prenant conscience de son corps par la naissance de l’esprit, il va devoir apprendre à se connaître en canalisant son tout à l’égo si souvent débordant. Ainsi l’Humanité qui est à découvrir garde égoïstement le silence, car l’humain prend soin de taire les secrets ou de les communiquer avec parcimonie, voir les encoder, sans pour autant faire référence aux techniques militaires.
Tout est question, (à voir depuis la tour de Babel ?), de compréhension de la langue. Les rappeurs d’aujourd’hui n’ont-ils pas leur propre langage qu’il nous faut déchiffrer ? L’argot excellemment pratiqué par le chanteur Pierre Perret est du même ordre. Qu’en est-il encore si l’on observe les formes cryptées que notre explorateur Champollion a longuement tenté de déchiffrer au pays des pyramides ? Véritables sources ésotériques, elles transmettent un langage secret livré aux échanges des initiés, mais incompréhensible pour celui qui n’en connait les codes.
De même les écritures sacrées de la Bible, du Coran, de la Torah, tant d’autres textes révèlent une symbolique qu’à leurs croyants pas toujours initiés. Combien de fois me suis-je étonné dans ma jeunesse de comprendre enfin les expressions codées, telle que par exemple le sens caché de « Heureux les simples d’esprit » ? Pour l’affidé il existe un sentier sûr, quant’ à la compréhension pour la lecture de la vie.
Il en est ainsi de l’œuvre du grand Jean de la Fontaine : quelques deux cent cinquante fables sans parler de ses contes (parfois très coquins) et autres œuvres littéraires moins connues du grand public. Le poète nous fascine, nous hypnotise, nous emmène, nous entraine dans le monde de l’un des plus grands patrimoines culturels français et tous ses préceptes font souvent partie intégrante depuis plusieurs siècles de la sagesse populaire. Il nous informe, ou plutôt nous délivre dans les deux sens du terme, sous des formes codées paraissant « simplistes », la vérité cachée sur la nature humaine. Sa symbolique animale d’une intelligence rare, (outre le fait de rappeler que l’homme est en premier lieu un mammifère), permet de suggérer, révéler, conseiller, aider l’humain. Il se verra ainsi avec ses qualités ou ses travers afin qu’il en prenne conscience, dans ce jeu de dupes, où le monde détourne pudiquement les yeux pour regarder ailleurs. Le poète recrée le principe du jeu du « paravent chinois » auquel nous avons tous joué un jour ; « Si Untel était un animal, quel animal serait-il ? ». Je me rappelle l’avoir pratiqué aussi dans le monde professionnel, et avoir été fort intéressé de mieux saisir la personnalité de collègues, dont je me souviens. Outre le chat, le chien, la fouine, plus rares furent les désignations d’un faon, d’un ours et d’une hyène… Effectivement cela apparaissait d’un coup comme évident éclairant mieux leurs rapports et comportements. Ainsi cher lecteur au travers des fables de La Fontaine, si l’on cherche à quel animal on ressemble, on peut mieux saisir la personne que l’on est.
Notre génial créateur des « animaux malades de la peste » est par ailleurs très pédagogue en délivrant comme message essentiel de ses fables : « Je me sers d’animaux pour instruire les hommes. » Ces fables restent toujours des thèses d’actualité que l’on perçoit dans la société d’aujourd’hui ; pas plus tard qu’hier soir sur une émission télévisuelle de grande écoute, l’invité politique défendait la cause animale afin de légiférer pour leur éviter des souffrances, en confirmant que les animaux sont doués de sensibilité et d’esprit. La Fontaine, merveilleux poète, magistral auteur de fables était également un fin psychologue. Par conséquence ses fables délivrent un langage universel, qu’il nous appartient de décoder afin de mieux les comprendre, pour en tirer toute leur substantifique moelle et leurs enseignements, afin de nous permettre de changer, d’évoluer et surtout de transmettre.
Merci à La Fontaine après Ésope d’avoir contribué à cette transmission.
Un véritable parcours du combattant pour contribuer à la sauvegarde de l’Humanité…
Daniel Allemand, septembre 2016