André-Clément-Victorin Bressier
Un lierre serpentait tout le long d’un vieux chêne,
Asile où vers le soir s’abritaient des moineaux,
Et de sa verdoyante chaîne
Enveloppait le tronc, atteignait les rameaux.
« Ici que viens-tu faire, arbuste parasite ?
Lui dit un des moineaux, cet arbre nous est cher ;
N’empiète pas sur notre gîte,
Et respecte les droits des citoyens de l’air.
Aux fentes d’un vieux mur cramponnant tes racines,
Va te loger dans les ruines ;
C’est là ta place, et ne viens pas
Comme un traître, étouffer notre ami dans tes bras. »
— « Ce reproche à bon droit m’offense,
Lui répond le lierre irrité,
Moi, traître ! moi qui suis (soit dit sans vanité)
Le symbole de la constance !
Ce chêne et moi n’avons qu’une même existence.
Au premier danger qui viendra
Menacer sa tige ébranlée,
Amis prudents, l’on vous verra
Prendre aussitôt tous la volée ;
Tandis qu’à ses flancs suspendu,
Partageant son destin, à ses périls en butte,
Je dois le suivre dans sa chute,
Et l’embrasser encor sur la terre étendu. »
« Le Lierre et les Moineaux »