Après six ans de mariage,
Blaise avec sa femme Isabeau
Faisait encore bon ménage.
Pour prix d’un exemple si beau,
Dans la maison chacun fut sage ,
L’enfant, le chien, le chat, l’écureuil et L’oiseau.
Noé, quand il sauva de l’eau
Les restes de l’humaine engeance,
Ne « vit jamais régner si bonne intelligence
Dans l’enceinte de son bateau.
Or, il advint qu’un jour de fête
Biaise but tant qu’il en perdit la tête.
Devinez-vous ce qu’il fit en rentrant?
Notre ivrogne battit sa femme.
Pour calmer son dépit le soir la belle dame
A son tour étrilla l’enfant;
L’enfant pinça le chien, le chien mordit la chatte,
La chatte à l’écureuil riposta de la patte,
Et l’écorcha je ne sais où;
Enfin d’un coup de dent l’écureuil en colère
Au pauvre oiseau tordit le cou.
Ainsi la faute d’un seul fou
Trouble une république entière,
Et le forfait du coupable puissant
Est toujours expié par le faible innocent.
« Le Ménage brouillé »
Francois Benoît Hoffman, 1760 – 1828