Les vieillards ne sont bons à rien :
Ainsi parle souvent la jeunesse légère.
Hé! comment ? N’ont-ils pas, pour instruire et pour plaire,
Les trésors de leur entretien ?
Un mendiant, à l’improviste.
Pénétra chez un bouquiniste.
J’ai dit bouquiniste, et j’ai tort,
Car si cet homme aimait bien fort
Les bouquins, c’était pour y prendre
Du plaisir et non pour les vendre.
Bouquineur eût été mieux dit.
On me comprend, cela suffit.
Le mendiant avait du sens : — Souffrez, de grâce,
Que quelquefois je prenne place
Parmi les raretés de ce beau cabinet. —
— Parmi les raretés ! de quel droit, s’il te plaît ? —
— Ah! pardon, Monsieur, je plaisante ;
Mais, sans trop d’orgueil, je me vante
De ressembler assez à ces nobles bouquins. —
— Oh ! le plus hardi des coquins !
Eh ! quoi ! le comparer à ces livres ! tu l’oses ? —
— Je suis jaune, flétri, couvert d’un parchemin:
Mais j’ai vécu beaucoup, et je sais tant de choses!
“Le mendiant amateur de bouquins”
- Alexis Rousset , 1799 – 1885