Un certain jour , s’il en faut croire
Des Charlatans la ridicule histoire ,
Un d’eux montrait, pour cinq sous , à la foire ,
De comédiens animaux
Les cent farces réjouissantes.
Là , singes en petits manteaux
Et guenons en robes traînantes
Cheminaient gravement, au son du flageolet :
C’était dans son espèce
La plus comique pièce.
On voyait en carrosse une chienne princesse,
Que suivait en livrée un matou , son valet.
Sapajou venait par-derrière ,
Ayant la canne en main et la brette au côté,
Et par le bras tenait grimaçante beauté,
D’une fort galante manière.
Plus loin , un groupe de magots
Sur haquenée arcadienne¹
En triomphe portait un lapin de garenne ,
Tous nos Messieurs costumés en héros.
Enfin d’acteurs muets une longue séquelle
En falbalas , en perruque , en dentelle ,
Remplissait avec majesté
Rôles divers; mais paquet de gimblettes .
Malicieusement jetté,
Déconcerte la gravité
Des vivantes marionnettes.
Nos personnages de courir .
Où les pousse un friand désir.
Adieu la superbe ordonnance
Grands Seigneurs et laquais, roture et qualité ,
Sans égard et sans préférence ,
Se disputent le don fait par la bienveillance ;
Hape qui peut, vive l’égalité !
On se querelle , on se tiraille ,
Et nos faméliques rivaux
Transforment le théâtre en un champ de bataille.
Riches habits de tomber par lambeaux,
Charlatan de hurler et spectateurs de rire;
Chacun des combattans à la fin se retire ,
Et la pièce finit.
Ce fabuleux récit
Des mœurs du genre humain est la fidelle image ;
Je n’en dirai pas davantage.
“Le paquet de Gimblettes”