Certain manant voyageait pour affaire ;
Il n’avait point vu de rivière,
Il en voit une… « Eh, bon Dieu ! qu’est ceci ?
Dit-il, comment ferai-je ? Où trouver un passage ?
Quand je suis sorti du village,
On ne m’a point parlé du fossé que voici.
Le sauter à pieds joints n’est pas chose facile.
Asseyons-nous, cette eau s’écoulera.
Dans deux heures au plus rien ne m’empêchera
De passer outre et d’aller à la ville. »
Ayant fini ce beau discours,
Il attendit et demeura tranquille.
Mais en dépit du manant imbécile,
L’eau coule et coulera toujours.
Il n’est rien, dites-vous, que le temps n’affaiblisse ;
Je vaincrai quelque jour ce dangereux penchant,
Que je ne puis surmonter maintenant.
Hélas ! jeune esclave du vice,
Vous ressemblez au paysan.
Vous attendez que le fleuve tarisse.
“Le Paysan et la Rivière”