Denis Charles Henri Gauldrée-Boileau
Un oiseleur prit un pinson ;
Il lui trouva l’œil vif et la mine gentille,
Et lui nouant à la patte un cordon,
Le porta, prisonnier, à sa jeune famille.
Le pauvre oiseau, jouet de quatre enfants,
Eut à souffrir de leurs nombreux caprices.
Que de tortures ! de tourments !
Les caresses, les soins des petits garnements
Etaient encore des supplices.
Un jour, par les bambins, le pinson disputé,
Déplorait sa captivité.
En paix, de main en main, d’abord le Cordon passe :
Bientôt de son côté chacun le tire ; il casse :
Le pinson dans ses fers cesse d’être arrêté ;
Il voit l’instant propice, et s’échappe au plus vite.
L’imprudent se croit libre, et ne l’est qu’à moitié ;
Dans les airs voltige à sa suite
Un long bout du cordon , à sa patte lié ;
Mais il n’y songe pas, il gagne le bocage,
Se jette dans les arbrisseaux ;
Son lien s’embarrasse à travers leurs rameaux,
Il veut se dégager, s’empêtre davantage ;
Et la cruelle faim vient aggraver ses maux.
L’infortuné périt en fuyant l’esclavage !
J’en viens à la moralité.
Une erreur à l’homme ordinaire,
Est de se croire en liberté,
Lorsqu’il traîne après lui les preuves du contraire.
En s’élançant vers la félicité,
Dupe souvent d’un espoir téméraire,
Il n’atteint que l’adversité.
“Le Pinson captif”