Nicolas François de Neufchâteau
U n beau jour, avec Célimène,
Que rien ne peut sauver de ses tristes ennuis,
Je parcours mes jardins; je cause, me promène,
Et vois tirer de l’eau du puits.
Célimène alors me défie :
« Sur ce qu’en ce moment, dit-elle, on voit ici,
« Je demande une fable à la philosophie. —
« Eh bien ! madame, la voici :
« Dans le Puits de la vie humaine,
« Deux Seaux * vont, tour-à-tour, s’élevant, s’abaissant:
« L’un porte le plaisir, l’autre apporte la peine;
« Quand l’un monte, l’autre descend.
« Célimène, ainsi la science
« Est de se consoler en un chagrin pressant :
« On peut, quand on le veut, nourrir sa patience
« De ce qu’on voit, même en passant. »
* Cette fable est un impromptu, provoqué, à la campagne, il y a quelques années, par une personne aimable, et alors fort malheureuse.
“Le Puits et les deux Seaux”