Pañchatantra ou fables de Bidpai
3e. Livre – XIV. — Le Roi et l’Oiseau
Il y avait dans un endroit d’une montagne un grand arbre, et là demeurait un oiseau nommé Simbhouka. Dans la fiente de cet oiseau naissait de l’or. Un jour un chasseur vint vers l’oiseau, et celui-ci fienta devant lui. Or quand il vit la fiente devenir de l’or au moment môme où elle tombait, le chasseur fut étonné : Ah ! depuis mon enfance il y a quatre-vingts ans que je fais métier de prendre des oiseaux, et jamais je n’ai vu de l’or dans la fiente d’oiseau. Après avoir ainsi pensé, il tendit là un filet, à l’arbre. Puis ce sot oiseau se percha là comme auparavant, le cœur confiant, et fut à l’instant même pris dans le filet. Le chasseur le retira du filet, le mit dans une cage et le porta à sa maison. Ensuite il pensa : Que ferai-je de cet oiseau dangereux ? Si jamais quelqu’un sait qu’il est de cette espèce et en instruit le roi, alors assurément je courrai risque de la vie. Par conséquent j’offrirai moi-même l’oiseau au roi. Après qu’il eut fait ces réflexions, il agit ainsi. Le roi, quand il vit cet oiseau, ouvrit de grands yeux dans son visage pareil à un lotus ; il éprouva la plus grande satisfaction, et dit : Holà, gardes ! gardez cet oiseau avec soin, et donnez-lui à manger, à boire et le reste tant qu’il voudra. Mais un ministre dit : Pourquoi accepter cet oiseau uniquement par confiance en la parole d’un chasseur qu’il ne faut pas croire ? Est-ce que jamais il naît de l’or dans la fiente d’oiseau ? Qu’on délivre donc cet oiseau des liens de la cage. D’après le conseil du ministre, le roi fit lâcher l’oiseau. Celui-ci se percha sur l’arceau de la grande porte, fit une fiente d’or, et, après avoir récité le sloka : D’abord moi seulement j’ai été fou, il s’en alla heureusement par le chemin de l’air.
Voilà pourquoi je dis :
D’abord moi seulement j’ai été fou, en second lieu l’oiseleur, puis le roi et le ministre : vraiment, tout un tas de fous.
Mais ceux-ci, cette fois encore, par l’effet du destin contraire, ne tinrent pas compte des paroles de Raktâkcha, toutes bonnes qu’elles étaient, et continuèrent de nourrir Sthiradjîvin avec divers aliments, de la viande en abondance et autres choses. Puis Raktâkcha appela sa troupe et lui dit en secret : Ah ! jusqu’ici notre souverain a possédé le bonheur et une forteresse. J’ai conseillé comme parle un ministre venu par héritage de famille. Réfugions-nous donc maintenant dans une autre forteresse de montagne. Car on dit :
Celui qui agit avec circonspection est heureux ; celui-là éprouve du chagrin, qui n’agit pas avec circonspection. J’ai vieilli ici dans la forêt, jamais je n’ai entendu parler une caverne.
Comment cela ? dirent-ils. Raktâkcha raconta :
“Le Roi et l’Oiseau”
- Panchatantra 43