Simon-Pierre Mérard de Saint-Just
1769.
De la société se faisant un délice ,
Un rossignol à la brillante voix,
Parmi les rossignols, hôtes du même bois ,
Ne trouva qu’envieux , pleins de noire malice ;
Il cherchoit un ami. Chez les autres oiseaux ,
Qui différent de mon espèce ,
Peut-être , se dit-il, n’ayant point de rivaux,
Je me ferai chérir. Au paon vite il s’adresse :
Beau paon, que je t’admire ! Ah ! je t’admire
aussi , Réplique celui – ci :
Soyons unis tous deux. Pourquoi passer la vie
Eloignés l’un de l’autre , et toujours s’isoler ?
Imitons les hommes.—— L’envie ,
Reprit le rossignol, ne sauroit nous brouiller ;
Nous sommes , vous et moi, comptés dans les merveilles,
Que l’on renomme sous les cieux :
Vous êtes fait pour charmer tous les yeux;
Moi, pour enchanter les oreilles.
Dès – lors au rossignol le beau paon fut lié
Par les doux nœuds de l’amitié.
En est-il de vraiment sincère
Entre rivaux, ennemis trop souvent?
Derram , le Rieniste, et Lailib, le savant,
Furent meilleurs amis que Keline et Voltaire.
“Le Rossignol et le Paon”