Sur la fin d’un bel automne
Le rouge-gorge chantait,
Et la corneille écoutait.
La corneille n’est pas bonne.
Elle insulta le chanteur,
Lui disant avec hauteur :
» Tais-toi, gazouilleur sauvage !
Crois-tu que tes sons grossiers
Rappellent à ce bocage
Le mélodieux ramage
De nos chantres printaniers?
—Non, reprit le rouge-gorge.
Ne crois pas que je me forge
Si haute prétention.
Je n’ai point l’ambition
De remplacer l’alouette,
Le rossignol, la fauvette;
Je respecte leurs concerts;
Mais dans la saison muette
Qui précède les hivers,
Peut-être que l’univers
Souffrira ma chansonnette. »
Ainsi, loin du sot travers
D’un chanteur qui se rengorge,
Le modeste rouge-gorge
Parlait de ses petits airs:
J’en dis autant de mes vers.
“Le Rouge-gorge et la Corneille”