Le Tisserand et son Fils
Jacques le Tisserand logeait avec son père;
Tous deux ils travaillaient et vivaient doucement.
Le bonhomme était vieux; il devint impotent,
Hors d’état de pouvoir rien faire.
Son fils le traîne à l’hôpital.
Quand un fils a deux bras, un métier, de l’ouvrage,
A nature peut-il faire un pareil outrage ?
Aussi tous les voisins trouvèrent cela mal.
Sois honte, ou soit pitié, les jours de bonne-chère,
Les jours qu’on fait la soupe au lard,
Jacques a soin de faire
Pour le pauvre vieillard
Une petite part.
Par son fils Colin il l’envoie,
Et l’enfant s’acquitte avec joie
De la commission. Le bon papa mourut.
Le pleura qui voulut.
Jacques alors dit à sa femme:
” Voilà mon père mort, Dieu veuille avoir son âme.
Il faut vendre le pot d’étain
Dans quoi nous mettions sa pitance.
C’est toi qui l’as serré, va le chercher, Colin.
– Le vendre, mon papa ! voyez la belle avance !
Et quand vous serez vieux et que je serai grand,
Il me faudra bien cher en acheter un autre.
– Et pourquoi faire un autre ? – Afin que mon enfant
Vous porte à l’hôpital … – Serais-tu si méchant !
Ton père à l’hôpital ? – Vous y mîtes le vôtre.
“Tisserand et son Fils “