La fable que tu dois apprendre
Parmi tes leçons d’aujourd’hui
Es-tu sûr de la bien comprendre?
— Pas beaucoup, dit Stéphane, et c’est là mon ennui.
L’on y raconte la querelle
De Borée et Phébus…— Sais-tu ce qu’on appelle
Phébus? c’est le soleil, et Borée est le vent
Qui souffle très-fort. Maintenant
Tu comprendras vite et sans peine
Ce que raconte La Fontaine ;
Tu comprendras… mais à condition
De lire avec attention.
— Eh ! bien, j’ai beau, mon petit père,
Lire avec soin. Je ne devine guère
Ce que peut être un balandras.
Donc pour me tirer d’embarras,
Vous qui traduisez tout, vous seriez bien aimable
De me traduire ici la fable
Que demain je réciterai.
— Puisqu’il le faut, je tenterai
De te la dire presque en prose.
Comment après le maître essayer autre chose ?
Qui donc, à moins d’avoir un orgueil bien pervers,
Oserait avec lui rivaliser en vers?…
* *
Le Vent et le Soleil se prirent de querelle
Un jour, chacun disant qu’il était le plus fort.
Pour juger lequel avait tort,
Ils eurent une idée assurément nouvelle.
Le plus fort, dirent-ils, sera celui des deux,
Oui, celui qui saura le mieux
Au premier passant dans celle avenue
Enlever son manteau. C’est chose convenue.
Un voyageur survient. Le Vent se jette alors
Avec fureur sur lui ; mais plus il fait d’efforts
Pour le déshabiller, plus notre homme s’attache
En grelottant à l’habit qui le cache.
A son tour le Soleil brille, et telle est l’ardeur
De ses feux que le voyageur
Par lui réchauffé, mis en nage,
Va chercher un abri sous quelque frais ombrage,
Non sans avoir auparavant
Déposé le manteau qu’il refusait au Vent.
En bien des cas, tant elle a d’influence,
La douceur réussit mieux que la violence.
“Le Vent et le Soleil”