Certain homme, qui, sans compagne,
Tenait ménage à la campagne,
Et s’ennuyait d’être garçon.
Acquit une horloge et prit femme.
Il visait de cette façon,
Tant à bien régler sa maison,
Qu’à fixer la joie en son âme.
Le projet sans doute était bon ;
Mais il n’eut point de réussite :
D’un côté l’horloge maudite
N’allait qu’à l’aide de la main.
Et s’arrêtait presqu’aussi vite
Qu’on l’avait pu remettre en train.
Le silence était son atraire,
Et non le bruit. Tout au rebours,
La femme ne savait se taire.
Et sur un rien avait toujours
Quelque fâcheux sermon à faire.
Le pauvre homme en devint tout sot.
Pour finir le conte en un mot.
Souvent l’horloge fut muette;
Souvent la femme querella.
Je plains quiconque fait emplette
De deux meubles comme ceux-là.
“Le Villageois, sa Femme et son Horloge”
Mercure de France, janvier 1750