Des chiens chassaient un loup. Il se trouva arrêté dans sa course par une rivière large et rapide; mais heureusement pour lui il y avait là un bateau, et il pria le maître de le passer de l’autre côté. « Que me donneras-tu pour ma peine? demanda le batelier.
— Je ne puis, sire, vous payer en argent, parce que je n’en ai pas; mais je vous dirai, si vous le voulez, trois maximes admirables, vraiment dignes d’être écrites en lettres d’or; et d’abord, pour vous prouver que mon intention n’est pas de tromper, voici la première :
« Fais toujours le bien, sans t’inquiéter de ce qui en arrivera. »
La maxime ayant fait impression sur le batelier, il recul le loup dans sa nacelle. Quand on fut au milieu de la rivière, notre passager ouvrit une seconde fois la bouche et dit : Si un trompeur te promet quelque chose, crains toujours d’être dupe. Enfin, lorsqu’il fut arrivé au bord, il s’élança hors du bateau, et en s’enfuyant ajouta :
Regarde toujours comme perdu ce que tu auras fait pour un méchant.
Notes :
Ce conte se trouve dans
-le Chasse-Ennui,pages 371 et 449. .
-Dans la Gibecière de Même, page 294
-Dana le Courier facétieux, page 23
-Dans le Facétieux Réveille-matin ; page 408
-Et dans le Passa-tempo de’ curiosi page 91
-Le Trésor des récréations, page 198 Le Fameux Arlotte, page 130
-Les Contes de Desperriers , tome III, page 218
-Et les Facetiœ Frischlini l’arrangent différemment.
Selon ceux-ci, c’est un pèlerin qui, n’ayant pas de quoi payer l’aubergiste chez lequel il a logé , offre de le satisfaire en chansons. ” Je n’ai pas besoin de chansons, dit l’hôtelier, il me faut de l’argent.”
— Mais, si enfin je parviens à vous rendre content par ce moyen-là, de quoi vous plaindrez-vous? « Et alors mon homme de chanter tout ce qu’il savait de chansons, sans qu’il put cependant réussir a le contenter. Enfin il en dit une, dont le refrain était ; Mettez la main à la poche et payez l’hôte. Oh ! pour celle-ci encore, passe ” dit l’aubergiste en souriant. ” Eh bien ! puisque celle-ci vous a satisfait, réplique le pèlerin, nous voilà quittes, adieu.”
Cette fable est la seule de laquelle j’ ai cité quelques imitations. Il m’eût été facile de faire la même chose pour le plus grand nombre des précédentes. Mais ces sujets, pour la plupart, n’étant point de l’invention de Marie, et par conséquent ne tenant point à l’honneur de la France comme nos fabliaux , nous sommes moins intéressés à les revendiquer sur ceux qui pourraient les avoir pillés.
*** Je ne retrouve pas cette fable dam les deux volumes de M. Roquefort. “Le Villain et le Loup”