« Avec l’amour où peut-on se déplaire?
Sous des lambris dorés qu’un autre soit heureux.
Lise, tu n’as qu’une chaumière ;
Une chaumière a tous mes vœux.
Si le Destin m’élevait sur un trône,
A mes sujets tu donnerais des lois,
Ou j’abandonnerais le sceptre et la couronne,
Pour la houlette et le hautbois. »
Ainsi parlait, en contemplant sa belle,
Mais en prose moins solennelle.
Un pastoureau plein de candeur,
Ayant plus d’amour dans le cœur
Que d’argent dans son escarcelle ;
Et la naïve pastourelle
Jurait à Biaise avec ardeur
Amour et constance éternelle.
– La Fortune qui les entend,
Prend la bourse et le vêtement
D’une laide et riche fermière,
Frappe à la porte du galant,
Et, pour séduire la bergère,
Revêt d’un fermier opulent
L’apparence lourde et grossière.
Adieu chaumière, adieu serment;
Biaise est meunier, Lise est fermière,
Et leur parole est la poussière
. Qu’emporte et disperse le vent.
Ce thème est bien usé, vont dire mes critiques,
J’en suis d’accord, vous pouvez le changer :
Au lieu de Lise et du berger,
Mettez des hommes politiques ;
Faites jurer tous ceux qu’il vous plaira ;
Pourvu qu’ils aient figure humaine.
Si la Fortune reste en scène,
— Mon dénouement y restera.
“Les Amants et la Fortune”
- Jean-Pons-Guillaume Viennet 1777 – 1868