Certain arbre chargé de fruits
Se croyoit le plus beau de tout le voisinage ;
Il s’estimoit d’un si grand prix,
Qu’aux siens il tenoit ce langage :
« Mes amis, disoit-il, le soir & le matin
On vient me visiter ; le maître & sa famille
Veillent sans cesse à mon destin.
La nuit souvent je fus courtisé par la fille. »
Le pauvre sot reconnut son erreur :
Dépouillé de ses fruits, il ne vit plus son maître.
On fourmille d’amis quand on est en faveur ;
Dans la disgrâce on les voit disparoître.
“Les Amis du Siècle”
Mercure, Août 1763.