Couché nonchalamment sur une molle estrade,
Un riche musulman, depuis un mois malade,
Haut se plaignait que maints amis
Ne venaient plus à son logis.
« Mon fidèle Kalmou le premier m’abandonne,
« Et le Joyeux Kadet… — Quoi! cela vous étonne?
« Ils n’osent, répondit Bazoun son intendant :
« Vous leur avez prêté maintes sommes d’argent.
« Le paîment est échu ; ne pouvant vous les rendre,
« Ils se feront, ma foi, longtemps attendre.
« — Va leur dire, Bazoun, qu’ils ne me doivent rien;
« Qu’ils viennent, mes amis, je leur ferai quittance.
« Oh ! j’aime mieux perdre mon bien
« Que de me voir privé de leur chère présence.
« — Pour vous débarrasser des amis importuns,
« Disait Sadi, prêtez aux pauvres votre bourse,
« Aux riches demandez à faire des emprunts :
« Vous les verrez s’enfuir sans arrêter leur course. »
“Les Amis et l’Argent”