Les chèvres, un beau jour, se mirent dans la tête
De porter barbe ; or donc, au plus puissant des dieux :
Ces dames, sans tarder, adressent leur requête :
Sans barbe elles sont bien, avec barbe encor mieux
Jupiter y souscrit. Les boucs, pleins de tristesse,
Jaloux de porter seuls ce signe de noblesse,
S’en plaignent hautement au souverain des cieux.
Laissez-les, leur dit-il, contenter leur caprice,
Et porter l’attribut de votre dignité ;
Je ne leur ai rendu qu’un bien faible service ;
Vous l’emportez toujours en magnanimité.
J’ai fini mon récit, et voici ma morale :
Et qu’importe, en effet, que tel autre m’égale
Par l’habit dont il est vêtu,
Si je le surpasse en vertu ?
“Les Chèvres et les Boucs”
- Jean-Auguste Boyer-Nioche, 1788-1859