Pierre Coutant
Poète et fabuliste contemporain – Les Crocodiles
Au soleil, loin d’ici, sur une petite île,
Venait de pondre un crocodile.
Et très vite les œufs éclosent dans le sable
Et les petits monstres veulent passer à table.
Ils ouvrent les râteaux leur servant de mâchoires
Et attendent que leurs parents y fassent choir
Vers blancs, mouches crevées, boyaux, fiente des mers:
Tout ce que peut donner le grand coeur d’une mère.
Or, parmi les petits, très tôt, dès le berceau,
L’un a le cou plus raide et se dresse plus haut
Ou son cri est plus fort, il bouscule ses frères:
Eh bien, c’est lui d’abord que nourrira sa mère.
C’est comme au restaurant ou chez votre crémier:
Celui qui crie plus fort est servi le premier;
Plus il est chiant et forte tête,
Plus on écoute sa requête.
Pierre Coutant