Deux lézards, animaux ovipares à quatre pieds et à longue queue, se promenaient à leur loisir, sur un mur exposé au soleil : ils se retirent ordinairement dans les haies et dans les trous des murailles. Que notre condition est méprisable ! dit l’un à son compagnon. Nous existons, il est vrai ; mais c’est tout : le plus petit ciron a cela de commun avec nous. Nous ne tenons aucun rang dans la création. Nous rampons comme de vils insectes, et nous sommes souvent exposés à être foulés aux pieds par un enfant. Que ne suis-je né cerf, ou quelque autre animal, la gloire de3 forêts ? Au milieu de ces murmures injustes, un cerf qui était aux abois, fut tué à la vue de nos deux lézards. Camarade, dit l’autre à celui qui s était plaint, ne pensez-vous pas qu’un cerf, dans une pareille situation, changerait volontiers sa condition avec la nôtre ? Ainsi, croyez-moi, apprenez à être content de la vôtre, et à ne pas envier celles des autres. Il vaut mieux être lézard vivant, que cerf mort.
Une condition obscure et médiocre est souvent la plus sûre : elle met les gens à l’abri des dangers auxquels sont exposés ceux d’un rang plus élevé.
“Les deux Lézards”