Il est toujours plus difficile d’agir aujourd’hui
Que de promettre à tort pour le jour qui s’ensuit;
Car les promesses et les grands discours ne servent à rien
Quand ils usent l’espoir comme une peau de chagrin !
Une gazelle, un jour, se trouva prisonnière
Des griffes d’un lion, d’un tigre et d’une panthère.
Ne se faisant nul doute sur sa fatale issue,
Elle ne voulut pas mourir sans s’être battue.
De ce fait, n’ayant aucune chance en puissance,
Elle décida de tout miser sur l’éloquence.
Et s’est enchaînée qu’elle partit en campagne
Pour espérer retrouver sa vie de cocagne :
“Attendez mes amis, soyez un peu patients
Avant d’entamer votre ravitaillement.
J’ai peut-être en mon ventre un petit de ma race,
Nous comblerons mieux à deux votre appétit vorace !
En plus d’un gigot musclé par le poids des ans,
Vous pourriez profiter de la tendresse d’un faon.
Vous voilà une urne ainsi que des bulletins,
Nous pouvons, de ce fait, procéder au scrutin !”
Les fauves furent séduits par son esprit loquace ;
En politique, il faut savoir être efficace.
Et face au programme alléchant du bovidé,
On vota sa survie à l’unanimité.
Puis, jour après jour, un discours suivait un vote
Qui, de la gazelle, faisait grimper la cote.
Mais un matin, un électeur fit le rebelle ;
Notre panthère bouda des urnes l’appel.
La gazelle perdit l’intérêt d’une voix ;
Les jours suivant cela passa à deux, puis trois.
L’abstention avait ainsi vaincu l’engouement ;
Quand on promet sans donner, ça arrive souvent.
Comme nous l’avions dit, elle était attachée,
Alors vous vous doutez de ce qui s’est passé.
On s’en désintéressa, même pour pitance,
La mort dans l’ignorance est la pire des souffrances.
Frontczak Emmanuel, Les élections de dame Gazelle.