Pour conquérir l’amour d’une Chatte assez belle,
Des Matous furieux un soir se poursuivaient.
La Chatte aime beaucoup qu’on se batte pour elle.
Aussi de toute part pleuvaient
Des coups de griffes qui gravaient
Sur plus d’un champion leur empreinte sanglante.
Tandis qu’à ce combat chacun d’eux prenait part,
Un seul des prétendants se tenait à l’écart
Dans une attitude prudente.
C’était un Chat poltron (il n’était pas Français),
Avide, cependant, des amoureux succès.
Dès qu’il vit s’éloigner la troupe turbulente,
A la belle il vint sans façon,
En faisant le gros dos, présenter son hommage,
Quand pour lui faire une leçon
La Chatte avec dédain miaula ce langage :
Éloigne-toi, Matou sans force et sans honneur,
Une Souris te ferait peur,
Pour un lâche crois-tu que jamais je soupire ?
Si tu veux que je t’aime, il faut que je t’admire.
Par quelque trait hardi montre-moi ta valeur,
Tu m’offriras après et ta patte et ton cœur.
Ce Chat humilié devint un diable à quatre ;
Plein d’amour et d’espoir, il ne fit que se battre,
Défit tous ses rivaux, en vainqueur généreux
Partagea tous les jours sa pâtée avec eux,
Et du vertueux Chat devint le vrai modèle.
Chattes de mon pays, voilà ce que j’appelle
Un exemple à suivre pour vous ;
Puissiez-vous ne jamais exercer la puissance
De vos airs gracieux, de vos regards si doux,
Que pour mieux diriger vos amis, vos époux,
Vers les vertus et la vaillance ;
Les bonnes Chattes font toujours les bons Matous.
“Les Matous et la Chatte”