Gille, histrion de foire, un jour par aventure.
Trouva sous sa patte un miroir.
Mon singe, au même instant, de chercher à s’y voir.
« 0 le museau grotesque, ô la plate figure!
S’écria-t-i, que je suis laid !
Puissant maitre des dieux,j’ose implorer tes grâces :
laisse-moi le lot des grimaces ,
Je te demande au reste un changement complet.”
Jupin l’entend, et dit : » Je consens à la chose.
Regarde : es-tu content de ta métamorphose ?”
Le singe était déjà devenu perroquet.
Sous ce nouvel habit mon drôle s’examine.
Aime assez sou plumage et beaucoup sou caquet ;
Mais il n’a pas tout vu. « Peste ! La sotte mine
Que me donne Jupin, le long bec que voilà !
J’ai trop mauvaise grâce avec ce bec énorme :
Donnez-moi vite une autre forme. »
Par bonheur, en ce moment-là. Le seigneur
Jupiter était d’humeur à rire :
Il en fait donc un paon : et cette fois le sire.
Promenant sur son corps des yeux émerveillés.
S’enfle, se pavane, et s’admire ;
Mais las! il voit ses vilains pieds ;
Et mon impertinente bête
A Jupin derechef adresse une requête.
“Ma bonté, dit le dieu, commence à se lasser :
Cependant j’ai trop fait pour rester en arrière.
Et vais de chaque état où tu viens de passer
Te conserver le caractère :
Mais aussi plus d’autre prière;
Que je n’entende plus ton babil importun.”
A ces mots, Jupiter lui donne un nouvel être.
Et qu’en fait-il ? Un petit maître.
Depuis ce temps, dit-on, les quatre n’en font qu’un.
“Les Métamorphoses du Singe”