Toutdon a dit en bon français,
A L’opposé de l’Évangile :
« Fais ce que je te dis, et non ce que je fais. »
Cette morale-là n’est pas d’un imbécile!
Or, un jour, il disait que la propriété
Était un vol fait aux autres ;
Que nous devions tous en société
Partager notre bien et vivre en bons apôtres.
Ce socialiste, dit-on, A terme louant sa maison,
Du loyer faisant la recette.
Par son locataire Avalon
Fut traité d’un ton malhonnête;
Quand ce débiteur sans façon,
N’ayant pu lui solder la somme.
Réduit aux extrêmes moyens,
Chercha dans son esprit à plaisanter notre homme :
« Tout étant, lui dit-il, en commun, de vos biens
« (Mettant vus leçons en pratique)
« Je veux prendre ma portion.
« Sur cela trouvez bon
« Qu’on vous fasse la nique,
« Mon bon monsieur Toutdon. »
Qui fut penaud? Ce fut notre utopiste !
Avalon fuit; il le suit à la piste.
En courant après lui, Toutdon, sur l’escalier,
Fut détourné par un fouriériste,
Qui, lui jouant un lourde son métier,
Agaçait sa jeune servante ;
Malgré son humeur endurante,
Toutdon chassa le phalanstérien.
Mais, ô surcroît! un vil galérien,
Se disant un vrai communiste,
Arrêta sur le seuil notre beau moraliste,
Et, pour cacher son jeu, faisant semblant de rien,
Lui déroba sa bourse à l’improviste!
Oh! combien d’hommes voit-on,
Les uns vêtus d’une étoffe légère,
D’autres drapés, à l’air noble ou sévère,
Qui, pleins de vanité, pour se foire un renom.
Bouleversent, hélas! et le ciel et la terre !
“Les Utopistes”